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JOGC
Éditorial| Volume 45, ISSUE 2, P103-104, February 2023

Il est grand temps d’optimiser le dépistage des maladies infectieuses pendant la grossesse

      Depuis toujours, les recommandations nationales conseillent le dépistage sérique universel du VIH, de la syphilis, de l’hépatite B et de la rubéole une fois par grossesse, généralement lors du premier rendez-vous de suivi prénatal
      • Adeleye A.O.
      • Plitt S.S.
      • Douglas L.
      • et al.
      Overview of a provincial prenatal communicable disease screening program: 2002–2016.
      ,
      • Kuo M.
      • Money D.M.
      • Alvarez M.
      • et al.
      Test uptake and case detection of syphilis, HIV, and hepatitis C among women undergoing prenatal screening in British Columbia, 2007 to 2011.
      . Cette approche s’est avérée efficace pour réduire le nombre d’infections par le VIH, la syphilis et l’hépatite B et leurs coûts associés. Principalement pensées pour prévenir les infections congénitales, ces recommandations ont aussi un bénéfice direct pour la personne enceinte grâce à la détection des infections et à l’adhésion thérapeutique. Toutefois, la situation épidémiologique canadienne (en particulier pour la syphilis et le VIH) évolue, l’adoption de la vaccination (grippe, coqueluche et COVID-19) pendant la grossesse s’améliore, et de nouvelles approches de prise en charge sont établies (p. ex., dépistage du cytomégalovirus). Il est temps de jeter un regard critique sur l’état de la situation actuelle et d’optimiser notre approche en adaptant le dépistage selon les facteurs de risque personnels, le statut vaccinal et la situation épidémiologique locale.
      L’approche de routine concernant les maladies infectieuses pendant la grossesse doit être exhaustive et viser (1) à déterminer le risque d’infection congénitale ou périnatale, (2) à offrir une prévention primaire ou secondaire au fœtus ou au nouveau-né, (3) à faciliter le diagnostic et le traitement de la personne enceinte et (4) à évaluer les besoins vaccinaux par rapport à la santé reproductive de la personne enceinte.
      Voici donc une liste des stratégies proposées :
      • Rubéole et varicelle : Adapter le dépistage sérique de l’immunité en fonction du carnet de vaccination et des antécédents médicaux. Il n’est pas nécessaire d’effectuer un dépistage sérologique chez les personnes ayant des antécédents d’infection ou de vaccination (2 doses de vaccin antirubéoleux ou 1 dose de vaccin contre la varicelle) pour confirmer leur statut immunitaire. S’il n’est pas possible de confirmer le statut immunitaire d’après le statut sérologique ou les antécédents d’infection ou de vaccination, il y a lieu de recommander la vaccination post-partum.
        • Boucoiran I.
        • Castillo E.
        • No
        368-rubella in pregnancy.
      • Virus de l’hépatite B (VHB) : Pour les patientes ayant un résultat négatif confirmé pour l’antigène de surface de l’hépatite B (AgHBs) ainsi qu’une preuve d’immunité (présence d’anticorps anti-HBs ou antécédents de vaccination), on ne doit pas refaire un dépistage de l’AgHBs. Pour les patientes enceintes non infectées sans antécédent de vaccination ni résultat positif à la recherche d’anticorps anti-HBs, la vaccination contre le VHB pendant la grossesse est recommandée.
        • Castillo E.
        • Murphy K.
        • van Schalkwyk J.
        No. 342-hepatitis B and pregnancy.
      • Virus de l’hépatite C (VHC) : Le dépistage du VHC est recommandé à chaque grossesse sauf pour les patientes déjà confirmées porteuses d’anticorps anti-VHC. Si une patiente enceinte s’avère atteinte d’un VHC détectable, la grossesse est une occasion importante de s’assurer qu’elle reçoit des soins spécialisés pour traiter le VHC pendant le post-partum.
      • Cytomégalovirus (CMV) : Le dépistage sérologique du CMV par recherche d’immunoglobulines (IgG et IgM), en plus d’un test d’avidité en cas de résultats positifs, permet d’identifier les patientes dont le fœtus est à risque d’infection congénitale à CMV.
        • Boucoiran I.
        • Yudin M.
        • Poliquin V.
        • et al.
        Guideline no. 420: Cytomegalovirus infection in pregnancy.
        On ne doit pas refaire de dépistage chez la patiente déjà reconnue IgG positive.
      • Syphilis, VIH, gonorrhée et chlamydia : En fonction de la situation épidémiologique locale, il pourrait s’avérer préférable de refaire un dépistage de ces infections transmises sexuellement à 28 semaines d’aménorrhée et à l’accouchement au lieu d’adopter une approche de dépistage avancée selon les facteurs de risque.
      • Parvovirus et toxoplasmose : Dans la plupart des régions du Canada, le dépistage systématique n’est pas indiqué.
      La grossesse est une occasion unique de dépister les infections et de fournir des conseils sur la vaccination, en particulier aux personnes qui voyagent pendant la grossesse ainsi qu’aux populations vulnérables qui ont autrement un accès très limité aux stratégies de prévention. De plus, les femmes s’attendent à ce que leurs fournisseurs de soins périnataux leur fournissent de l’information au bon moment de sorte qu’elles puissent faire un choix éclairé concernant les risques pour la grossesse, par exemple, en cas d’infection congénitale à CMV.
      L’approche décrite ci-dessus cadre avec la campagne Choisir avec soin. Le fait d’effectuer des analyses sérologiques inutiles à chaque grossesse, par exemple pour la rubéole ou le parvovirus, peut entraîner des examens, traitements et vaccins inutiles, ce qui n’améliore en rien les soins en plus de potentiellement exposer la patiente à des dangers et lui causer du stress. Ces examens inutiles imposent aussi une pression sur les ressources d’un système de santé déjà à bout de souffle.
      La mise en œuvre des stratégies pragmatiques proposées, qui sont conformes aux directives cliniques de la SOGC, devrait réduire les coûts de dépistage tout en améliorant les taux de diagnostic et de vaccination maternels. La responsabilité des fournisseurs de soins périnataux va au-delà des soins de grossesse et englobe la santé générale des femmes, la grossesse étant le moment idéal pour engager les femmes dans des soins de santé préventifs.

      Références

        • Adeleye A.O.
        • Plitt S.S.
        • Douglas L.
        • et al.
        Overview of a provincial prenatal communicable disease screening program: 2002–2016.
        J Obstet Gynaecol Can. 2020; 42: 269-276
        • Kuo M.
        • Money D.M.
        • Alvarez M.
        • et al.
        Test uptake and case detection of syphilis, HIV, and hepatitis C among women undergoing prenatal screening in British Columbia, 2007 to 2011.
        J Obstet Gynaecol Can. 2014; 36: 482-490
        • Boucoiran I.
        • Castillo E.
        • No
        368-rubella in pregnancy.
        J Obstet Gynaecol Can. 2018; 40: 1646-1656
        • Castillo E.
        • Murphy K.
        • van Schalkwyk J.
        No. 342-hepatitis B and pregnancy.
        J Obstet Gynaecol Can. 2017; 39: 181-190
        • Boucoiran I.
        • Yudin M.
        • Poliquin V.
        • et al.
        Guideline no. 420: Cytomegalovirus infection in pregnancy.
        J Obstet Gynaecol Can. 2021; 43: 893-908