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Directive Clinique de la SOGC| Volume 38, ISSUE 12, SUPPLEMENT , S461-S464, December 2016

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Lignes directrices pour ce qui est des soins à offrir aux femmes enceintes qui vivent avec le VIH et des interventions visant à atténuer la transmission périnatale : Résumé directif

      Résumé

      Objectif

      La présente directive clinique passe en revue les données probantes traitant des soins à offrir aux femmes enceintes vivant avec le VIH et de la prévention de la transmission périnatale du VIH. Les soins prénataux à offrir dans le cadre de grossesses compliquées par une infection par le VIH devraient comprendre un suivi mené par une équipe multidisciplinaire comptant des spécialistes du domaine.

      Issues

      Parmi les issues évaluées, on trouve l'effet du VIH sur l'issue de la grossesse, ainsi que l'efficacité et l'innocuité du traitement antirétroviral, et celles d'autres mesures visant à atténuer le risque de transmission verticale.

      Résultats

      La littérature publiée a été récupérée par l’intermédiaire de recherches menées dans PubMed et The Cochrane Library en 2012 et en 2013 au moyen d’un vocabulaire contrôlé (p. ex. « HIV », « anti-retroviral agents », « pregnancy », « delivery ») et de mots clés (p. ex. « HIV », « pregnancy », « antiretroviral agents », « vertical transmission », « perinatal transmission ») appropriés. Les résultats ont été restreints aux analyses systématiques, aux essais comparatifs randomisés / essais cliniques comparatifs et aux études observationnelles rédigés en anglais ou en français. Aucune restriction n’a été imposée en matière de date. Les recherches ont été mises à jour de façon régulière et intégrées à la directive clinique jusqu’en juin 2013. La littérature grise (non publiée) a été identifiée par l’intermédiaire de recherches menées dans les sites Web d’organismes s’intéressant à l’évaluation des technologies dans le domaine de la santé et d’organismes connexes, dans des collections de directives cliniques, dans des registres d’essais cliniques et auprès de sociétés de spécialité médicale nationales et internationales.

      Valeurs

      La qualité des résultats est évaluée au moyen des critères décrits dans le rapport du Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs (Tableau 1).

      Mots clés

      Abréviations:

      ALAT (alanine aminotransférase), ARN (acide ribonucléique), ASAT (aspartate aminotransférase), EIA (essai immunoenzymatique), IV (intraveineux), NIH (National Institutes of Health), PCR (amplification en chaîne par polymérase), TARc (traitement antirétroviral combiné), ZDV (zidovudine)

      Comité sur les maladies infectieuses

      Mark H. Yudin, MD (président), Toronto (Ont.)
      Victoria Allen, MD, Halifax (N.-É.)
      Céline Bouchard, MD, Québec (Québec)
      Marc Boucher, MD, Montréal (Québec)
      Isabelle Boucoiran, MD, Montréal (Québec)
      Sheila Caddy, MD, Calgary (Alb.)
      Eliana Castillo, MD, Calgary (Alb.)
      Heather Gottlieb, MD, Calgary (Alb.)
      V. Logan Kennedy, inf. aut., Toronto (Ont.)
      Deborah Money, MD, Vancouver (C.-B.)
      Kellie Murphy, MD, Toronto (Ont.)
      Gina Ogilvie, MD, Vancouver (C.-B.)
      Caroline Paquet, s.-f. aut., Trois-Rivières (Québec)
      Julie van Schalkwyk, MD, Vancouver (C.-B.)

      Collaboratrices spéciale

      Ariane Alimenti, MD, Vancouver (C.-B.)
      Neora Pick, MD, Vancouver (C.-B.)

      Recommandations

      • 1.
        Toutes les femmes vivant avec le VIH qui planifient connaître une grossesse ou qui deviennent enceintes devraient discuter de leur situation particulière avec des spécialistes du domaine et faire l'objet d'une orientation vers des fournisseurs de soins obstétricaux et des programmes de prise en charge du VIH. De plus, un plan global devrait être formulé pour ce qui est de leurs soins de maternité. (II-2A)
        Tableau 1Critères d'évaluation des résultats et de classification des recommandations, fondés sur ceux du Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs
        Niveaux de résultats
        La qualité des résultats signalés dans les présentes directives cliniques a été établie conformément aux critères d’évaluation des résultats présentés dans le Rapport du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs69.
        Catégories de recommandations
        Les recommandations que comprennent les présentes directives cliniques ont été classées conformément à la méthode de classification décrite dans le Rapport du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs69.
        • I:
          Résultats obtenus dans le cadre d'au moins un essai comparatif convenablement randomisé.
        • II-1:
          Résultats obtenus dans le cadre d'essais comparatifs non randomisés bien conçus.
        • II-2:
          Résultats obtenus dans le cadre d'études de cohortes (prospectives ou rétrospectives) ou d'études analytiques cas-témoins bien conçues, réalisées de préférence dans plus d'un centre ou par plus d'un groupe de recherche.
        • II-3:
          Résultats découlant de comparaisons entre différents moments ou différents lieux, ou selon qu'on a ou non recours à une intervention. Des résultats de première importance obtenus dans le cadre d'études non comparatives (par exemple, les résultats du traitement à la pénicilline, dans les années 1940) pourraient en outre figurer dans cette catégorie.
        • III:
          Opinions exprimées par des sommités dans le domaine, fondées sur l’expérience clinique, études descriptives ou rapports de comités d’experts.
        • A.
          On dispose de données suffisantes pour appuyer la mesure clinique de prévention.
        • B.
          On dispose de données acceptables pour appuyer la mesure clinique de prévention.
        • C.
          Les données existantes sont contradictoires et ne permettent pas de formuler une recommandation pour ou contre l'usage de la mesure clinique de prévention; cependant, d'autres facteurs peuvent influer sur la prise de décision.
        • D.
          On dispose de données acceptables pour déconseiller la mesure clinique de prévention.
        • E.
          On dispose de données suffisantes pour déconseiller la mesure clinique de prévention.
        • L.
          Les données sont insuffisantes (d’un point de vue qantitatif ou qualitatif) et ne permettent pas de formuler une recommandation; cependant, d’autres facteurs peuvent influer sur la prise de décision.
        La qualité des résultats signalés dans les présentes directives cliniques a été établie conformément aux critères d’évaluation des résultats présentés dans le Rapport du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs69.
        Les recommandations que comprennent les présentes directives cliniques ont été classées conformément à la méthode de classification décrite dans le Rapport du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs69.
      • 2.
        Toutes les femmes enceintes devraient se voir offrir un dépistage du VIH, s'accompagnant de services adéquats de counseling avant et après la tenue du test, dans le cadre de leurs soins prénataux réguliers, et ce, pour chaque grossesse. La tenue d'un tel dépistage devrait être répétée à chaque trimestre chez les femmes pour lesquelles la présence d'un risque élevé et continu d'infection par le VIH a été identifiée. (II-2A)
      • 3.
        Les femmes enceintes vivant avec le VIH devraient être avisées du fait que, si elles utilisent un traitement antirétroviral combiné de façon méthodique et si elles s'abstiennent d'allaiter, le risque de transmission périnatale est < 1 %. (I-A)
      • 4.
        Toutes les femmes enceintes vivant avec le VIH devraient être traitées au moyen d'un traitement antirétroviral combiné, peu importe leur numération des CD4 et leur charge virale de base. (II-2A)
      • 5.
        Le traitement antirétroviral ne devrait pas être abandonné au cours du premier trimestre pour des raisons obstétricales; toutefois, lorsque la femme en question ne reçoit pas de traitement et en l'absence d'une indication médicale urgente pour ce qui est de la mise en œuvre d'un traitement antirétroviral combiné, cette dernière peut être différée jusqu'à après la 14e semaine de gestation. (III-B)
      • 6.
        Toutes les femmes vivant avec le VIH (tant celles qui comptent toujours une charge virale détectable après avoir été exposées à un traitement antirétroviral que celles qui n'ont pas encore été exposées à des antirétroviraux) devraient être soumises au génotypage du virus et, dans la mesure du possible, à un test de résistance phénotypique de façon à ce que l'on puisse optimiser le traitement antirétroviral. Il est conseillé de consulter des cliniciens expérimentés pour l'interprétation du génotypage et en ce qui concerne toute modification du traitement antirétroviral. Le dépistage du HLA-B*5701, s'il n'a pas déjà été fait, est recommandé au cas où l'on devrait avoir recours à l'abacavir. (II-2B).
      • 7.
        L'utilisation d'un schéma posologique de traitement antirétroviral combiné comptant une base double d'inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (qui comprend un ou plusieurs inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse et un inhibiteur de protéase potentialisé [boosted]) devrait être privilégiée, en raison de la confiance accrue en son innocuité et en son efficacité pendant la grossesse que lui accordent les spécialistes. Dans la mesure du possible, nous devrions avoir recours aux antirétroviraux dont la capacité à traverser le placenta et à atteindre la loge fœtale est connue. (II-2B)
      • 8.
        Dans la mesure du possible, les médicaments pour lesquels l'on ne dispose d'aucune donnée sur l'innocuité devraient être évités au cours de l'organogenèse. L'efavirenz ne devrait pas être prescrit au cours du premier trimestre de la grossesse en raison de sa tératogénicité potentielle; toutefois, lorsque la patiente est déjà exposée et que le tube neural s'est refermé, le traitement à l'efavirenz peut être poursuivi. Le traitement à la névirapine ne devrait pas être entamé pendant la grossesse (à moins qu'il ne s'avère indiqué en raison des profils de résistance de la patiente en question), puisqu'il est alors associé à un taux élevé d'issues indésirables graves; toutefois, un traitement continu à la névirapine ayant été entamé avant la grossesse peut être poursuivi tout au long de celle-ci, lorsque sa tolérance et son efficacité ont été établies. (II-3D)
      • 9.
        Lorsque le traitement antirétroviral est abandonné pour quelque raison que ce soit au cours de la grossesse, tous les médicaments devraient être abandonnés en même temps (à moins que la patiente en question soit traitée au moyen d'inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse; dans un tel cas, une fin de traitement faisant appel à deux inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse pour une durée d'une semaine est recommandée); de plus, tous ces médicaments devraient être réutilisés simultanément, afin de minimiser le risque de voir apparaître une résistance virale pendant le traitement. Le traitement antirétroviral devrait être remis en œuvre aussi rapidement que possible à la suite de l'abandon, et ce, afin de minimiser le risque de rebond de la virémie et le risque potentiellement accru de transmission verticale. (II-1A)
      • 10.
        Lorsqu'une femme enceinte connaît une nausée de la grossesse d'une intensité considérable, le traitement antirétroviral ne devrait être entamé que lorsque la nausée est adéquatement maîtrisée. La plupart des antinauséeux utilisés pendant la grossesse peuvent être coadministrés avec des antirétroviraux. Lorsque la patiente fait déjà l'objet d'un traitement antirétroviral et qu'elle présente une hyperémèse de la grossesse, tous les antirétroviraux devraient être abandonnés en même temps, pour ensuite être tous remis en œuvre simultanément lorsque la nausée et les vomissements sont maîtrisés (à moins que la patiente en question soit traitée au moyen d'inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse; dans un tel cas, une fin de traitement faisant appel à deux inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse pour une durée d'une semaine est recommandée [pour prévenir une future résistance aux inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse]). (II-2D)
      • 11.
        Le traitement devrait être personnalisé pour maximiser l'observance du schéma posologique d'antirétroviraux prescrit. (III-A)
      • 12.
        La modification systématique de la posologie du traitement antirétroviral combiné n'est pas recommandée pendant la grossesse. (III-D)
      • 13.
        L'état clinique, virologique et immunologique de la patiente devrait être évalué toutes les quatre à huit semaines, tout au long de la grossesse, et une fois de plus à six semaines postpartum. L'évaluation de la réaction de la patiente au traitement antirétroviral et de l'échec possible de ce dernier devrait s'effectuer en fonction des critères réguliers. La toxicité des antirétroviraux devrait également faire l'objet d'un suivi à ces occasions. Les modalités particulières du dépistage devraient être personnalisées en fonction des toxicités connues du schéma posologique antirétroviral de la patiente. (III-B)
      • 14.
        Comme dans le cas de toutes les femmes enceintes, toutes les femmes enceintes vivant avec le VIH devraient, sans égard à l'âge et dans le cadre d'un processus de consentement éclairé, se voir offrir une échographie de datation et des services de dépistage génétique prénatal non effractif visant les aneuploïdies fœtales significatives sur le plan clinique les plus courantes. (III-A)
      • 15.
        La tenue d'une échographie obstétricale détaillée à 19-20 semaines de gestation est recommandée. La tenue d'échographies additionnelles (visant à déterminer la croissance fœtale et le volume de liquide amniotique) est recommandée au moins à chaque trimestre ou en fonction des indications obstétricales. (II-3B)
      • 16.
        Comme dans le cas de toutes les femmes enceintes, toutes les femmes enceintes vivant avec le VIH devraient faire périodiquement l'objet d'un dépistage visant la consommation de substances psychoactives; de plus, la dépendance aux drogues devrait être abordée conjointement avec la prise en charge du VIH, au besoin. (III-A)
      • 17.
        Le mode d'accouchement devrait faire l'objet de discussions détaillées avec toutes les femmes :
        • a.
          Lorsque la patiente fait l'objet d'un traitement antirétroviral optimal et qu'elle présente une suppression acceptable de sa charge virale plasmatique (moins de 1 000 copies/ml) au cours des quatre dernières semaines précédant l'accouchement, la tenue d'un accouchement vaginal est recommandée, en l'absence d'autres indications obstétricales nécessitant la mise en œuvre d'une césarienne. Lorsque la tenue d'une césarienne est recommandée en raison d'indications obstétricales, elle peut être effectuée à 39 semaines, conformément à ce qui est habituel en présence de telles indications. (I-A)
        • b.
          Les femmes qui ne font pas l'objet d'un traitement antirétroviral optimal (p. ex. aucun traitement antirétroviral, monothérapie seulement ou charge virale ne faisant pas l'objet d'une suppression complète) devraient se voir offrir une césarienne planifiée avant l'apparition du travail, soit à environ 38 semaines complètes de gestation. (II-2A)
      • 18.
        Le traitement à la zidovudine par intraveineuse devrait être entamé dès l'apparition du travail et se poursuivre jusqu'à l'accouchement, conjointement avec un schéma posologique antirétroviral combiné administré par voie orale, et ce, peu importe le mode d'accouchement, le schéma posologique antirétroviral en cours ou la charge virale. (III-B)
      • 19.
        Pendant la période intrapartum, l'administration par voie orale d'une dose unique de névirapine (200 mg) demeure une option en présence de circonstances inhabituelles (c.-à-d. une femme vivant avec le VIH qui n'a pas reçu de traitement antirétroviral prénatal pendant la grossesse). (II-2B)
      • 20.
        Des plans pour la poursuite des soins visant le VIH devraient être formulés pendant la période prénatale et, sauf indication contraire, le traitement antirétroviral maternel devrait se poursuivre après l'accouchement et son utilisation continue devrait être réévaluée par des professionnels offrant des soins aux adultes visant le VIH. (II-1A)
      • 21.
        Les nouveau-nés exposés au VIH devraient recevoir un traitement antirétroviral pendant six semaines pour prévenir la transmission verticale du VIH. (I-A)
      • 22.
        Les praticiens qui offrent des soins aux nouveau-nés ayant été exposés au VIH devraient fournir des services de dépistage diagnostique du VIH en temps opportun : Amplification en chaîne par polymérase visant le VIH à la naissance, à 1 mois et à 3-4 mois, et sérologie visant le VIH à 18 mois. (II-A) De plus, ils devraient assurer le suivi des issues à court et à long terme (p. ex. en demeurant à l'affût du retard du développement et des effets indésirables du traitement antirétroviral). (III-A).
      • 23.
        L'allaitement n'est pas recommandé, peu importe la charge virale plasmatique du VIH et l'utilisation d'un traitement antirétroviral. (I-E)
      • 24.
        La grossesse devrait être inscrite aux programmes de surveillance pour assurer la collecte de données provinciales et nationales qui permettront d'orienter les futures politiques en matière de grossesse. Les femmes qui reçoivent un traitement antirétroviral pendant la grossesse devraient également se voir offrir de participer à des études pertinentes. (III-B)
      Ce document fait état des percées récentes et des progrès cliniques et scientifiques à la date de sa publication et peut faire l’objet de modifications. Il ne faut pas interpréter l’information qui y figure comme l’imposition d’un mode de traitement exclusif à suivre. Un établissement hospitalier est libre de dicter des modifications à apporter à ces opinions. En l’occurrence, il faut qu’il y ait documentation à l’appui de cet établissement. Aucune partie de ce document ne peut être reproduite sans une permission écrite de l'éditeur.